[RP délire ouvert] Tournois du Couronnement.

Finalement remis de mes blessures grâce aux bons soins des mages de l'infirmerie, c'est avec un grand émoi que j'appris la nouvelle de ma participation, encore une fois, à un des challenges du tournois. Cette fois-ci, l’arène poussiéreuse avait été troquée pour un parc so cliché, tout en gazon et en fleur. Des dispositifs de retransmission voletaient ici et là tout en nous fixant de leur œil mécanique. On nous annonça que l'épreuve allais bientôt commencer. Épreuve dont je ne connaissais toujours pas l'exacte sujet. Un carrosse tiré par deux chevaux blancs fit son apparition, et il en sortit Tiberius, toujours avec une expression goguenarde vissée sur le visage. Comme c'était ennuyeux. Un soldat s'approcha de moi, ainsi qu'un autre de mon opposant, et on nous remis un petit coffret recouvert de velours, contenant une bague finement ciselée. Je fronçai les sourcils. Tous ces indices n'indiquaient rien de bon... Et effectivement, le roi se leva et proclama, tout fier de lui :

"L'épreuve d'aujourd'hui a été désignée : il s'agit de l'épreuve de demande en mariage ! (applaudissements déchaînés à travers les hauts parleurs qui transmettaient les réactions du public) Comme son nom l'indique, vous devez parvenir à demander en mariage la personne qui vous sera présentée. épatez-nous mes jolis !"

... Génial. En plus ( je jetais un regard en coin à l'autre participant) la personne contre qui je devais lutter était vraiment bien foutu, et avait déjà enflammé les foules avec son spectacle pyrotechnique de chant. Moi qui étais aussi vierge qu'un disque à graver tout juste acheté... Pas une seule petite amie n'était venue agrémenter le parcours de ma misérable existence. Il allait falloir improviser... Un autre point m'ennuyait : il fallait juste faire une demande en mariage ? Ou est-ce qu'il fallait augmenter le plus possible les chances pour que la cible accepte la requête ? Si ça se trouve, j'allais me retrouver dans un remake de Mario, à devoir atteindre une princesse Peach bien gardée derrière des kilomètres d'obstacles... Je m'attendais vraiment au pire.... Mais courage mon petit Lowen ! C'est pour le vœux, le VOEUX ! Allez, on peut le faire, je suis avec toi, moi-même ! Gonflé à bloc, j'observai avec la plus grande des attentions deux silhouettes sortir du carrosse. L'une se dirigea vers moi...

"Yahoo ! (ça devait être une salutation...?) Kilala-chan ici présente! Alors, alors c'est toi qui dois me demander en mariage ? Kyaaa,c'est embarrassant ! Et ben, et ben, prend bien soin de moi d'accord...? Même si, bon, t'as pas l'air très très classe... Yaaah ! Prend pas cet air énervé ! Tu me fais peur ! Tu ne vas rien me faire hein, hein ? Mais, ouaaah ! J'ai trop hâte ! Ah. Nan, je veux que ce soit le beau gosse là-bas qui m'épouse, il est mieux que toi. Ouah, il m'a regardé juste là nan !? Ouah, comment je réagis moi ? Dis, dis, toi là, je suis bien maquillée ? Heiiiin, il doit s'occuper d'une autre fille ? C'est trop pas juste ! J'en veux plus ! Dis dis, toi, allez, occupe-toi de moi ! Et mieux que de cette autre fille !"

Elle avait dis ça avec un débit de parole impressionnant. Un frisson descendit le long de mon échine tandis qu'un haut-le-cœur effectuait le trajet inverse dans mon estomac. Une véritable montagne russe émotionnelle cette épreuve.
La jeune femme se tenait en face de moi. Elle avait encore une apparence juvénile, surtout grâce à sa tenue, mais je la soupçonnais d'être en réalité une adulte. La tenue justement, parlons-en. C'était... très coloré. Et volumineux aussi. Pour résumer simplement, je dirais une hybridation étrange et grotesque entre un rouleau de tissu à froncer et les couleurs de l'arc en ciel. Ne reste plus qu'à épingler sur le côté un sac avec des oreilles de lapin pour agrémenter le tout. Tout cela étant surmonté d'une tête, assez agréable à l’œil je dois l'admettre, mais dont les tempes étaient ceintes d'une criarde chevelure rose formant deux authentiques couettes. Quel malheur. Moi qui avait appris à apprécier la beauté et la sensualité féminine...
Non, sérieusement. Deux secondes. J'avais le besoin urgent de faire un bilan existentiel de ma situation là. Est-ce que j'avais vraiment BESOIN de faire ce que je m’apprêtais à faire ? Est-ce que si, disons, je tournais les talons, marchais sur quelques mètres, tout cela s’effacerait de ma vie comme si le concours n'avais jamais existé ? Vraisemblablement que non. Dommage.
Une vague de ressentiment envers Tibérius m'envahis. Je  lui jetais un regard embué, tel un caniche avec un début de conjonctivite :

"Pourquoi? Pourquoi Tibérius ! Notre relation n'était donc que passagère ? J'ai été bienveillant avec toi, j'ai fait toutes sortes de choses pour toi ! Et avec quel dédain me récompenses-tu ? Monstre ! Je ne te croyais pas ainsi. Adieu, je m'en vais."

J'aurais tellement aimé dire ça... Mais ça n'aurais sous doute pas d'avantage tourné la situation en ma faveur... Kilala se pencha vers moi, la tête inclinée et la mine boudeuse :

"Et baaaaaah ? Qu'est-ce qu'il y a, toi ? Tu bouges plus du tout, t'es pas marraaant... Ah ! T'es fasciné par ma beauté en fait, c'est ça hein, c'est ça ! Uwaaah, tu vas me faire rougir là... J'taime bien en fait ! Tu voudrais pas devenir mon permeron? ça te va bien, t'es tout faiblard !"

Ah. ...Nan. Je veux pas. Je refuse. Laissez-moi rentrer. Foutez-moi la paix. Je veux jouer aux jeux vidéoooos! Je veux me faire maltraiter par mes chaaats! ...Beuh. Maison. Snif. Fais ce que tu veux, j'en ai plus rien à faire. Je me retranche dans mon faible intérieur. Allez-y mes muscles, mes poumons, mon cœur, agissez en toute liberté. Le cerveau est en congé aujourd'hui pour cause de déprime profonde.
Après cette puissante réflexion, mon corps se mit à s'actionner sans que je ne le désire réellement. Je sentis ma main se refermer sur l'écrin qu'on nous avais remis, toujours dans ma poche. Mes jambes s'ébranlèrent, et je me retrouvai un pas en plus loin. Visiblement, mon visage n'avait pas d'expression bien définie, car Kilala pris une mine de petit chiot apeuré :

"Hu...Hum? Tu vas bien ? Uwaaah, qu'est-ce que tu va me faire ! Ça fait si longtemps que tu n'a pas approché une femme de près, alors tu va me sauter dessus ?? T'es en manque en fait, c'est ça hein ! Maieuh, et bah, d'abord, t'as même pas le droit ! Si tu fais ça, tu vas te faire arrêter et t'auras tout plein d'ennuis!"

Ah... J'aurais aimé pouvoir m'enfuir en courant, ou au moins fermer les yeux pour ne plus voir ce spectacle à base de trémoussements et de gloussements. Mais mon visage ne semblait pas vouloir m'accorder cette dernière faveur... Traître. Moi qui ai pris soin de toi pendant des années. Tu ne vaux pas mieux que Tibérius. C'est ainsi que, impuissant, presque aux abois, je me vis avec horreur m'agenouiller devant the lady multicolore, dégainer la bague dans la plus pure des traditions, et demander dans une voix rauque que je ne me reconnaissais pas :

"Voudrais-tu, Kilala, partager ta vie avec moi, et ce jusqu'à la fin ? Accepterais-tu de m'épouser ?"

Ça y est, je l'avais dis. Pour une raison qui m'étais inconnue, Kilala me regardait la bouche ouverte, les yeux grands ouverts. Il y avais une certaine ressemblance avec le vindex qui m'avait envoyé rouler jusque devant les portes de la mort... Je préférai ne pas m'attarder sur la pensée. L'épreuve était enfin finie... Bon, pour le romantisme et les petites gâteries au public, on repassera. J'avais bien conscience que ce parc regorgeait d'opportunités : le kiosque, la balade en barque... Mais c'était juste impossible pour moi. Ce que je venais de faire s'aventurait déjà bien trop au devant de mes limites mentales.


[Ouah, j'ai eu du mal, c’était pas super inspirant... Mais ça y est, je l'ai fait !]

Ethan étouffa tant bien que mal un énième bâillement. Il n’avait dormi que quelques heures, n’ayant pas pu se résoudre à rentrer à l’auberge avant d’avoir parcouru le marché nocturne d’artefacts de Maggya en long, en large et en travers. Avec l’afflux touristique provoqué par le couronnement de Tibérius, les exposants avaient amassé un nombre de gadgets faramineux qui compliquaient les recherches…mais le terrien avait tout de même fini par identifier 4 ou 5 bijoux à la fois puissants et esthétiquement satisfaisants. Bien sûr, il n’avait absolument pas les moyens de les acheter (activiste à Black Crown rimait rarement avec rouler sur l’or, à part pour ceux qui profitaient de la renommée de l’organisation pour s’enrichir de manière discutable). Il s’était donc contenté de les inscrire soigneusement sur sa liste au père no…à Tibérius, décuplant à cette occasion sa volonté de remporter le concours. Un sourire victorieux se dessina sur son visage quand arrivé devant le palace, il aperçut sur l’immense panneau relayant les informations clés du tournoi son prénom en vert clignotant. S’il n’avait pas encore réussi à remporter une seule victoire, au moins avait il de la chance avec le tirage au sort. Il ignora soigneusement l’irritante petite voix dans sa tête lui murmurant « jamais deux sans trois » - cette-fois-ci, il gagnerait à coup sûr ! Notant distraitement que le lieu de l’épreuve avait encore changé (il allait finir par connaître les environs du château comme sa poche), il se dirigea avec hâte vers son destin. Sur le chemin, la foule s’intensifiait de plus en plus, et certains spectateurs commençaient à le reconnaître.

« Ehhh, regardes ! Le mec là-bas, ce ne serait pas Ethan ? »
« Tiens, c’est le beau gosse qui a affronté le chef de l’UR. Il parait qu’ils ont tous les deux un fan club maintenant ! »
« Il a encore une épreuve aujourd’hui…Il doit commencer à fatiguer. On dirait que le jeune roi aime bien le martyriser. »
« Maman, tu crois qu’il va encore perdre ? »

Celle-ci fit légèrement grincer les dents du demi-extraterrestre. Ce gamin avait certainement un goût exquis…Il secoua vivement la tête, se rendant compte de la direction sadique que prenaient ses pensées. Ses supérieurs avaient définitivement une mauvaise influence sur lui. D’ailleurs, il ferait mieux de se reconcentrer, il était enfin arrivé au…parc ? Interloqué, il balaya l’espace du regard, confirmant rapidement la présence d’oriflammes blancs et violets à l’entrée de l’espace vert. Après tout, vu la nature des épreuves jusqu’à maintenant, il ne savait même pas pourquoi il s’étonnait encore. Le jeune homme s’extirpa de la foule et se présenta aux gardes, qui après quelques palpations et sorts anti-armes le laissèrent pénétrer dans le parc.

Instantanément, le bruit des spectateurs s’assourdit, laissant place à un fond de musique classique et de gazouillements d’oiseaux. L’air semblait aussi plus frais, véhiculant une odeur suave de fleurs inconnues. Malgré lui, Ethan sentit tout son corps se détendre. C’était officiellement son arène préférée jusqu’à maintenant. Allant s’installer aux côtés de son concurrent, qui n’avait lui pas l’air particulièrement à l’aise malgré le calme environnant, le terrien profita des quelques minutes de répit avant le début de l’épreuve pour observer les alentours. Certaines plantes lui étaient familières, mais la plupart abordaient des couleurs et des formes fort peu terrestres. La pelouse elle-même avaient des reflets violets et or perturbantes. Des petits…yeux mécaniques...voletaient un peu partout autour d’eux, probablement prêt à retransmettre dans le moindre détail leur « performance » sur les écrans géants surplombant le parc. Alors qu’il réfléchissait à comment s’en procurer un (c’était tout de même infiniment plus discret qu’un drone et potentiellement très utile pour des missions d’infiltrations), un carrosse aux couleurs du royaume surgit de l’allée centrale, accompagné des acclamations assourdies des spectateurs.

Avec sa théâtralité et son aisance habituelles, Tiberius bondit sur la place, adressant un signe de tête aux deux gardes (apparemment pas juste là pour décorer) qui réagirent en remettant chacun à l’un des concurrents une petite boite. Ethan scruta la sienne avec suspicion une seconde avant que sa curiosité naturelle ne l’emporte et qu’il l’entrouvre délicatement, dévoilant une bague nichée dans du velours. Compte tenu l’aspect du contenant, ce n’était pas vraiment une surprise, mais le jeune homme haussa tout de même un sourcil songeur. Ils étaient sur Maggya alors peut-être que…empli d’espoir, il tenta d’enfiler l’anneau à son doigt (il avait toujours rêvé de pouvoir être invisible), avant de se rendre compte que celui-ci était bien trop petit pour lui. Avec une moue déçue, il observa le bijou de plus près : finement ciselé, il s’agissait de toute évidence uniquement d’un ornement, plutôt destiné à une femme. Perplexe, il leva les yeux vers Tiberius, qui semblait avoir attendu ce moment pour proclamer avec un sourire narquois :

« L'épreuve d'aujourd'hui a été désignée : il s'agit de l'épreuve de demande en mariage ! Comme son nom l'indique, vous devez parvenir à demander en mariage la personne qui vous sera présentée. Épatez-nous mes jolis ! »

 A ce moment-là, les applaudissements du public étaient à leur comble – pourtant Ethan aurait pu jurer avoir entendu le bruit de sa confiance qui se brisait. Sérieusement ? Est-ce que…Est-ce qu’il y avait une RÈGLE de ce fichu tournoi imposant que le niveau de gêne soit plus élevé à chaque épreuve ? Est-ce qu’un roi ne devrait pas au contraire avoir la tête bourrée de protocoles et de bonne manière pour préserver l’image sociale et la dignité de chacun de ses interlocuteurs ? Il jeta un regard indigné à Tibérius et aux gardes l’entourant – d’un côté un sourire satisfait, de l’autre des visages de marbre - de toute évidence, personne ici n’avait quoi que ce soit à faire de son ego. Il ressentit cependant un certain soulagement en constatant que son concurrent semblait aussi perdu que lui – AU MOINS n’était il pas seul à affronter cette humiliation. Car c’est bien à ça qu’il se préparait : s’il n’était pas novice en matière de relations interpersonnelles intimes, ça ne datait pas d’hier et une demande en mariage était tout de même d’une toute autre ampleur qu’une amourette de lycée. Si les séries et les films lui avaient appris quelque chose, c’était bien qu’il y avait vraiment beaucoup de manière de rater ce genre de déclaration. Il inspira profondément, convoquant de toutes ses forces mentales le souvenir des merveilleux artefacts hors de prix qu’il allait extorquer à Tibérius une fois qu’il aurait gagné le concours. Il devait gagner, il allait gagner, il était hors de question qu’ils perdent une troisième fois.

Réussissant pénible à repasser en mode « combatif », il fixa les deux silhouettes tout juste sorties du carrosse avec la même détermination froide qu’il aurait pu fixer un adversaire coriace. Les jeunes femmes étaient toutes les deux…marquantes, dans des genres très différents. La première était colorée, juvénile et sautillante – Ethan se désintéressa d’elle dès qu’il la vit se diriger vers son adversaire. La deuxième s’approchaient de lui d’un pas mesurée, sans la moindre hâte, un air d’ennui sur le visage. Elle semblait plus âgée, et pas plus âgée dans le genre « mature et posée ». Au contraire, son être entier semblait fait de lassitude et d’antipathie. Sa tenue était ce qui crispait le plus le terrien : une tunique verdâtre tâchée aux manches, des bas délavés abordant des déchirures très punk, des chaussures usées aux lacets dépareillés. Se sentant mal, le jeune homme s’efforça de se concentrer sur le visage de sa dulcinée : ses yeux sombres et ses lèvres pleines avaient un certain charme, mais il n’arrivait pas à se concentrer dessus, perturbé par la coiffure les encadrant : des tresses asymétriques, laissant échapper une multitude de mèches sèches de couleur douteuse.  Il ne pensait honnêtement pas que c’était possible d’être aussi négligée, et il sentait venir du plus profond de son âme un besoin viscéral de juste kidnapper la…personne probablement humaine…dans sa chambre d’auberge pour ne la laisser ressortir qu’une fois lavée, coiffée et habillée par ses soins.

Un profond raclement de gorge sortit brutalement Ethan de ses pensées. Absorbé par son doux fantasme de relooking, il n’avait pas remarqué que la jeune femme était désormais plantée devant lui, visiblement en attente d’une réaction de sa part. Il força un sourire contrit :

« Ah, pardon, pardon ! Ma nuit a été un peu courte, je crois que ne suis pas encore bien…prêt à affronter les horreurs de ce monde…réveillé. »

Son interlocutrice haussa un sourcil, visiblement peu impressionnée par son excuse. Il y avait probablement des débuts de relations plus prometteurs. Ethan inspira profondément – il allait falloir être persévérant.

« Tu es ma partenaire pour l’épreuve, c’est ça ?
-Brillante déduction. Et accessoirement, mon nom – que tu n’as pas eu la politesse de demander – est Harriet.»

Sa voix, étonnamment fluette, rendait son ton cassant encore plus marqué. Ethan se sentit presque frissonner. Il pensait avoir acquis au fil de son engagement à Black Crown une certaine expérience en voix menaçantes, glaçantes, condescendantes voire simplement terrifiantes, mais celle-ci méritait sa propre catégorie. Bien sûr, vu le caractère tordu de Tibérius, le terrien ne s’attendait pas à une partenaire parfaitement réceptive…Peut-être était elle simplement un peu timide ? Il ne serait pas étonné d’apprendre que la jeune femme vivait à l’écart de la civilisation et n’avait pas eu à engager de rapports sociaux depuis des années…Réussissant à s’autoconvaincre via une bonne dose d’imagination, il planta fermement ses yeux dans ceux de sa compagne (la seule partie qu’il pouvait fixer sans ressentir un profond frisson parcourir son âme) et esquissa son sourire le plus rassurant.

« Mes excuses Harriet, l’émotion m’a fait oublier mes bonnes manières. Tu peux m’appeler Ethan. Je suis enchanté de faire ta connaissance. »

Pour appuyer son propos, il saisit délicatement la main de son interlocutrice et y déposa ses lèvres, ignorant du mieux qu’il le pouvait l’état déplorable de ses ongles. Relevant les yeux vers Harriet pour juger de l’effet de son petit tour, il dû se retenir de ne pas sursauter devant l’expression de pur dégoût imprégnant le visage de la jeune femme.

« Ne fais PAS ça, c’est répugnant.» Siffla-t-elle, l’indignation évidente dans sa voix.

Ethan tressaillit – la douleur de la remarque cinglante était presque physique. Tout l’apaisement qu’avait précédemment pu lui apporter le parc s’était officiellement envolé. Tentant tant bien que mal de retrouver sa contenance, il ferma les yeux une seconde, cherchant à interpréter de la manière la plus positive possible ce qui venait de se passer. Vu son apparence, il était peu probable qu’Harriet soit mysophobe, mais peut-être avait-elle peur du contact physique en général ? Ce serait une raison plausible pour vivre à l’écart de la société…Satisfait de son nouveau scénario, il inspira un grand coup et ouvrit de nouveau les yeux, prêt à affronter son destin. Son adversaire (il n’arrivait définitivement plus à considérer Harriet comme sa partenaire) le fixait avec un dédain évident, mais qu’importe : il était prêt à relever le défi et il avait sa stratégie.

« …Bien ! Que dirais tu, chère Harriet, d’un petit tour en barque ? Il fait un temps SPLENDIDE, ce serait dommage de ne pas en profiter.  
-Waou…un tour en barc...Quelle origi…
-Et puis le parc est tellement joli ! Est-ce qu’il a été construit spécialement pour l’événement ? Ou il fait partie des jardins royaux ? En tout cas c’est très relaxant, absolument relaxant. Je viens souvent sur Maggya mais c’est la première fois que je vois ce type de végétaux.
- Je m’en f…
- Ah, voici les barques ! Je n’ai jamais eu à conduire de bateau, mais on dirait qu’elles sont enchantées pour réagir aux injonctions vocales…Bien, bien, au moins nous ne tomberons pas à l’eau. Je ne suis pas sûr d’avoir des vêtements de rechange à l’auberge, vois-tu. Je t’en prie, grimpe, je te suis.
- Tu… !
- Alors, suivant les instructions…. « Barque, avance toi! ». Ohh, ça bouge vraiment. Tu n’as pas peur Harriet ? Ne me fixe pas comme ça, je vais rougir. Tiens, quel est ce drôle d’oiseau là-bas ? On dirait un peu un canard géant violet…Maintenant que j’y pense, pourquoi avoir choisi le violet et le blanc comme couleurs du royaume ? Sur Terre, il me semble que le blanc symbolise la royauté en héraldique, mais j’ai des doutes sur le violet. La magie, peut-être ? Un peu banal du coup, non ? »

A ce point du monologue, Harriet semblait profondément agacée mais avait visiblement renoncé à tenter d’ouvrir la bouche et Ethan jubilait. Sa stratégie, bien que rudimentaire, remplissait à merveille sa fonction : lui permettre d’avancer dans l’épreuve sans avoir à subir des dégâts mentaux en permanence. Certes, il n’allait probablement pas gagner des points auprès de la jeune femme en agissant, mais après tout Tibérius n’avait jamais dit qu’il fallait la séduire, il devait simplement la demander en mariage. Il hésitait encore sur la manière dont il allait s’y prendre. Le classique agenouillement ? Ou quelque chose de plus excentrique ? Heureusement, son cerveau était parfaitement capable de maintenir la « conversation » et d’y réfléchir en parallèle.

« J’aime personnellement beaucoup la couleur argentée, je la privilégie souvent pour mes artefacts. Ah, bien sûr, ce n’est pas le facteur principal, mais j’avoue que je préfère. C’est beaucoup plus noble que l’or, tu ne trouves pas ? Ah, nous commençons à être un peu loin de la côte… « Barque, longe le rivage ». C’est assez agréable, j’y prends goût. Tu sais ce qui aurait été encore mieux ? Un pic-nic ! Je devrais en parler à Tibérius. Imagine-toi que, quand j’étais plus jeune, j’allais souvent pique-niquer dans la forêt avec mes parents…»

Dix minutes et une bonne vingtaine d’anecdotes d’enfance plus tard, Ethan s’était finalement décidé. Il allait faire sa demande au cœur de la roseraie qu’il avait aperçu un peu plus tôt. C’était simple, romantique, et le côté épineux convenait à Harriet à merveille. Riant intérieurement de sa petite analogie mesquine, il ordonna à la barque de s’amarrer.

« Je t’en prie, après toi, Harriet. De quoi parlait-on déjà ? Ah oui, c’est vrai, de gâteaux. Je pense que c’est l’une des raisons pour laquelle je me rends si souvent à Paris : acheter des pâtisseries françaises. C’est inimitable, je t’assure. Mais je serai aussi très curieux de tester ce qui existe ici. J’aurai adoré participer à l’épreuve précédente…Harriet ? »

La jeune femme s’était arrêtée au milieu du chemin, l’air hagard. Ethan haussa un sourcil interrogateur, un peu inquiet. Peut-être se sentait elle mal après le tour de barque ? Il ne l’appréciait pas beaucoup, mais vomir devant la moitié du royaume serait tout de même un peu trop humiliant…Il se rapprocha d’un pas, prenant garde à ne pas initier de contact physique.

« Harriet, tout va bien ?
-…stop…
- Tu te sens mal ? Tu veux qu’on s’assoie ? Je t’apporte à boire ?
- J’ai dit STOP. Articula plus distinctement Harriet.
- Tu t’es fait mal à la jambe ? Ne t’énerve pas d’accord ? Est-ce que c’est grave ? Tu veux que je demande à Tibérius d’arrêter l’épr…
- LA. FERME.

Cette fois-ci, la jeune femme avait définitivement retrouvé son énergie, bien que visiblement purement portée par la rage.

- Je cède, j’ai perdu, je veux bien t’épouser ou je ne sais pas quoi, juste. Tais-toi. »

Le jeune terrien la fixa un instant, médusé, avant d’hocher la tête silencieusement. Visiblement, il venait de vaincre son adversaire par la…simple puissance de sa parole ? Il extirpa de sa poche le coffret que lui avait remis le garde et le lança à Harriet qui l’attrapa aisément. Avec un air dubitatif, elle en tira l’alliance et l’enfila avec un profond soupir, déclenchant les applaudissements déchaînés de la foule.